Archipel graphique

Les œuvres des Abattoirs - Frac Midi-Pyrénées donnent la part belle aux dessins contemporains entre images animées, langages visuels et traces graphiques, cette exposition nous plonge au cœur de ce langage inné chez l’homme qui n’a de cesse de se développer dans la scène artistique actuelle.

Œuvres de la collection des Abattoirs - Frac Midi-Pyrénées : Oliver Beer, Stéphane Calais, Valérie du Chéné, Marianne Plo.

Tracer, dessiner est une action directe du cerveau à la main.
Le dessin a donc naturellement été à la base de l’art ; jusqu’au milieu du XIXe siècle, il était l’étape indispensable de préparation des tableaux comme des sculptures. Considéré longtemps en occident, comme outil de préparation, le dessin demeure en Orient l’expression de l’essence des choses où les formes se réduisent aux lignes essentielles.

Dans son étymologie même – celle de dessein, de l’italien disegno –, le mot dessin renvoie à l’idée de projet. Tout dessin procède de la mise en forme d’une pensée en acte.
En cela, le dessin contemporain demeure ce qu’il a toujours été au fil de l’histoire de l’art, le lieu privilégié de toutes les projections et de toutes les expériences, le signe précurseur d’une civilisation de l’œuvre : un territoire de liberté.

En s’imposant comme une recherche nécessaire, ce médium fait preuve aujourd’hui d’une omniprésence inédite, jusqu’à devenir l’un des plus fréquemment exposés dans les lieux dédiés à l’art contemporain.
Il dépasse ainsi les espaces de la page pour emprunter son format à la peinture d’histoire, à des dispositifs d’installations pour être regardé et exposé au même rang que les autres œuvres.

Archipel Graphique vous propose une excursion visuelle mettant en scène la jeune création contemporaine autour des multiples ardeurs du dessin.

Ecrire ... c’est dessiner, nouer les lignes de telle sorte qu’elles se fassent écriture, ou les dénouer de telle sorte que l’écriture devienne dessin  [Jean Cocteau- Opium, 1930]

Donnant aux mots son rôle premier, l’artiste Valérie du Chéné construit un espace pictural où le trait et les formes s’imbriquent dans une histoire collective liée à nos espaces communs. La parole d’anonymes devient alors l’action menant au dessin, un chemin de la mémoire orale à une mémoire visuelle.

Ainsi ses architectures de dessins intimes entrent en écho avec des mondes plus universels baignés dans la culture du merveilleux.

Plongés dans des histoires imagées, les artistes Marianne Plo et Oliver Beer questionnent les récits et rêves collectifs plus globaux.
Du mythe d’Orion à Alice au pays des merveilles, l’image dessinée, animée voire coloriée prend une audacieuse puissance, celle du vertigineux pouvoir créatif où les artistes font voler en éclat les codes traditionnels pour mixer les époques. Les références se juxtaposent pour déceler d’inédits panoramas graphiques où l’empreinte du récit se fond dans la légèreté des traits.
Pour l’exposition, l’artiste Marianne Plo imagine une alchimie optique où le dessin devient une forme numérique-artisanale. En puisant dans les artifices de l’informatique, ses créations deviennent un film d’animation zéro questionnant la frontière de l’immobilité.
Les dessins glissent, vibrent dans une nouvelle spatialité où la couleur et l’image deviennent une texture dessinée.

Avec les œuvres de Stéphane Calais le dessin se place à l’origine de tout en nous plongeant dans une traversée entre les genres et les âges : toucher l’essence même de la création.
De sa série de dessins HD proche de l’univers de la bande dessinée à son déploiement dans l’espace, l’artiste se déjoue des codes de l’art où l’humour prend toute sa force. Avec sa sculpture gestuelle perfect love, l’acte de dessiner se rapproche du geste répétitif de l’histoire des hommes où les parois rocheuses sont remplacées ici par les murs de l’exposition.
Le dessin demeure ainsi l’éternel acteur de l’action de l’homme sur sa perception des mondes.

Invités à déambuler dans ces archipels graphiques, le visiteur prend part à un voyage au cœur d’images en mouvements, de chroniques imaginaires et de langages communs car finalement dessiner ne serait-ce pas voir ?