Le rideau de scène de Picasso

La Dépouille du Minotaure en costume d’Arlequin

Pablo PICASSO
en collaboration avec Luis FERNANDEZ
"La dépouille du Minotaure en costume d’Arlequin"
Rideau de scène pour la pièce Le 14 juillet de Romain Rolland

Mai – Juillet 1936

En mai 1936, Pablo Picasso (1881-1973) est invité à réaliser un grand rideau pour la manifestation célébrant le premier “14 Juillet” depuis l’arrivée au pouvoir du Front populaire. Ce rideau doit servir de fond de scène pour un acte de la pièce de Romain Rolland, Le 14 Juillet, destinée à être jouée au théâtre de l’Alhambra à Paris.

Cette commande s’inscrit à la suite des nombreuses collaborations de Picasso avec le monde de la scène  entre 1917 et 1924. S’il ne travaille qu’une seule fois pour le théâtre, avec l’Antigone de Cocteau (1922), il conçoit de grands décors pour plusieurs ballets, dont le plus connu est Parade (1917). Cette fois, ne disposant que d’un délai court pour réaliser le rideau, l’artiste choisit de prendre comme maquette une petite gouache réalisée quelques mois plus tôt. La toile monumentale est achevée à temps pour la représentation grâce au talent de son ami peintre Luis Fernández (1900-1973), à qui il confie l’agrandissement de sa maquette.

Ce rideau est ensuite resté plusieurs années dans ce théâtre parisien et a servi de décor à plusieurs représentations de pièces et de danses espagnoles, avant d’être sauvé de la destruction par le poète Louis Aragon , qui le rapporte dans l’atelier de l’artiste.

Un rideau de scène dans une salle de musée ?

En 1965, une grande exposition est organisée au Musée des Augustins de Toulouse par le conservateur Denis Milhau, mettant en avant les œuvres que Picasso a réalisées pour le cirque, la musique, la danse et le théâtre. A la fin de l’exposition, Picasso offre le rideau à la Ville de Toulouse. La peinture est ensuite stockée au Musée des Augustins durant plusieurs décennies.

Réalisé rapidement sur du coton fin avec des peintures légères, le rideau s’est abîmé pendant cette période de stockage. En 1994, un mécénat de BNP Paribas permet de financer la restauration de l’œuvre, réalisée dans des hangars de l’aérospatiale.

En juin 2000, il trouve sa place dans la grande salle du sous-sol des Abattoirs, conçue spécialement pour accueillir cette œuvre monumentale. Les architectes ont repris l’idée de la configuration d’une salle de théâtre : un point de vue d’en haut (le paradis), une vue depuis un balcon, à la manière d’une loge, des escaliers servant de gradins face au plateau et le rideau en fond de scène.

La fragilité du Rideau, due tant à la rapidité de sa réalisation qu’à sa technique et son poids important, oblige à le mettre au repos pour pouvoir le conserver pour les générations futures. Régulièrement, il est couché sur une surface inclinée à l’abri de la lumière, juste derrière les grandes portes coulissantes du fond de la salle. Il ne quitte ainsi jamais la pièce, mais se cache simplement derrière le mur...

Cette œuvre est accompagnée d'un dispositif tactile pour le public déficient visuel.

Peint en collaboration avec Luis Fernández, d’après une gouache de Picasso
Détrempe à la colle protéinique sur toile en coton écru
830 x 1325 cm ; 27 kg
Don de l’artiste en 1965
Acquis pour le Musée de peinture et de sculpture, dit Musée des Augustins, en 1965
Dépôt aux Abattoirs en 1995 (Inv. : D.1995.4.1 )